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Saint Erasme

extrait de La Légende dorée de Jacques de Voragine, édition de 1527 imprimé par Wynken de Worde,
traduction de Enora Affabulon

voici la Vie du saint évêque et martyr, saint Érasme. Le saint homme, saint Érasme, était issu d\'une noble et grande famille, et il était non seulement doux par sa naissance, mais aussi par ses actes et ses conditions. Au temps où régnait l\'empereur Dioclétien, qui était un grand persécuteur du peuple du Christ, ce saint homme, saint Érasme, arriva dans le pays de Campanie, qui était sous la juridiction dudit Dioclétien, et là, ce saint homme prêcha au peuple la parole de Dieu, et lui enseigna la foi chrétienne, et il le baptisa au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit. Ce saint homme fut ensuite choisi et nommé évêque de tout le pays de Campanie, et il prêcha et enseigna au peuple comment il devait servir Dieu et l\'aimer, et éviter le péché.

L\'empereur apprit que saint Érasme avait converti tout le pays de Campanie à sa croyance et à son Dieu qu\'il appelait Jésus-Christ, né d\'une vierge pure, Marie. L\'empereur, très inquiet, envoya ses chevaliers à la recherche de ce saint homme, saint Érasme, et leur ordonna de l\'obliger à renoncer à son Dieu qu\'il appelait Jésus-Christ, et s\'il ne le faisait pas, de le tourmenter pour lui donner le plus de peines qu\'ils puissent imaginer. Il arriva donc qu\'ils trouvèrent ce saint homme, et ils le lièrent comme s\'il eût été un voleur ou un malfaiteur, et ils l\'amenèrent devant le juge, et le juge lui dit d\'un air abattu et méchant : Homme grossier et incrédule, pourquoi tiens tu tant, par tes œuvres diaboliques, de convertir tout le peuple de sa croyance à ta croyance et à ton Dieu ? Pourquoi ne crois-tu pas au même dieu que Dioclétien et que nous croyons ? Je te le dis en vérité, si tu n\'abandonnes pas et ne renies pas ton Dieu, que tu appelles Jésus-Christ, et que tu pries le dieu sage, nous te pendrons si horriblement que toutes les veines de ton corps se briseront. Alors le bon saint Érasme répondit humblement et doucement, et dit:

Dieu tout-puissant, qui a fait toutes choses, qui a créé le ciel et l\'enfer et tout ce qui s\'y trouve, je ne l\'abandonnerai pour rien au monde, car sa bonne grâce m\'a fait une telle grâce, ainsi qu\'à d\'autres de ses amis choisis, qu\'il s\'est fait homme et a goûté et souffert la mort amère pour moi et pour tous les pécheurs. Lorsque le juge entendit cela de ce saint homme, il s\'enflamma de colère contre lui, le fit battre sur la tête, cracha sur son visage béni, et le couvrit d\'immondices au point qu\'il semblait avoir la lèpre. Quand ce juge tyrannique vit que ce bon saint Érasme souffrait ainsi patiemment, et qu\'il remerciait toujours notre Seigneur Jésus-Christ de tout, alors il s\'en alla avec une grande cruauté et fit battre ce saint homme si cruellement avec des maillets de plomb, que toutes ses veines devaient se rompre et éclater, ce dont il ne se souciait pas, car il le souffrait de bon cœur, pensant à l\'amour du Christ. Le juge cruel ordonna ensuite de mettre ce saint homme dans une fosse profonde, pleine de serpents, de vipères, de vers et d\'autres vers, puis il prit du soufre et de l\'huile, les fit bouillir, et y jeta ce saint homme, qui y resta couché comme dans de l\'eau froide, remerciant et louant Dieu. Quand ce juge impitoyable vit que rien ne périssait pour lui, il s\'irrita davantage, prit de la poix et de l\'huile détrempées et en mit dans la bouche de ce saint homme, toujours assis dans la fosse ou la fournaise, remerciant et louant Dieu. Alors s\'éleva une si grande tempête de tonnerre et d\'éclairs, que le fourneau sur lequel saint Érasme était assis brûla, et il ne fut ni affligé ni blessé, mais toutes les autres personnes cruelles qui se trouvaient à proximité furent brûlées par la même tempête. Lorsque l\'empereur entendit cela, il fut tellement en colère qu\'il fit de grandes chaînes et des verrous de fer, qu\'il mit autour de son cou sacré, et le fit jeter dans la fosse susmentionnée qui était pleine de vers, afin qu\'ils mangent ce saint homme Érasme. Alors vint un ange de Dieu qui éclaira toute la fosse et tua tous les vers. Et alors ce saint Érasme fut tout entier, et comblé par la grâce de Dieu, et contre la volonté des méchants, il sortit de nouveau de cette fosse, et s\'en alla prêcher la parole de Dieu jusqu\'à la mort du cruel empereur Dioclétien, et alors vint un autre empereur, le haut Maximien, et il était bien pire que Dioclétien ; et quand ce Maximien entendit parler de la vie de ce saint Érasme, alors il le fit prendre et voulut lui faire abandonner son Dieu et sa foi.

Quand il vit qu\'il ne voulait pas changer de croyance, il fit mettre ce brave homme dans une casserole bouillante de colophane, de poix, de plomb de soufre et d\'huile, et il la versa dans sa bouche, mais il ne se rétracta pas. Quand ce cruel empereur vit que cette douleur ne lui faisait aucun mal, alors il fit un manteau de métal comme de l\'airain ou du cuivre, et le rendit brûlant, et le mit sur son saint corps. Dès que ce manteau eut touché son corps sacré, elle brûla et consuma toutes les personnes mauvaises et méchantes qui se trouvaient là. Par ce miracle, beaucoup de gens furent convertis à la foi chrétienne.

Alors lui apparut l\'ange de Dieu, qui le réconforta dans sa grande tribulation, et le rendit entier et fort, et le transporta de là, et lui dit:

O saint Érasme, l\'ami le plus choisi de Dieu, sois fort dans ta tribulation, car grâce à ton grand martyre, beaucoup parviendront à la vie éternelle, crois donc fermement en Dieu et ne l\'abandonne pas.

Lorsque saint Érasme entendit cela, il repartit avec joie, prêcha et convertit beaucoup de gens à la foi chrétienne, plus que jamais auparavant. Et quand l\'empereur eut compris cela, il poursuivit encore le saint homme, et lui ordonna un manteau de fer, et il ordonna qu\'on le rende incandescent, et qu\'on le mette ainsi sur le corps nu du saint homme. Et quand ils eurent trouvé saint Érasme en train de prêcher, ils le prirent et lui dirent: Si tu ne veux pas abandonner ton Dieu et ta fausse croyance, et prier et adorer notre dieu, nous mettrons sur ton corps nu ce manteau brûlant. Alors le bon Érasme répondit : Mon Seigneur et mon Dieu a tant fait et souffert pour moi plus que je n\'ai mérité. C\'est pourquoi je souffrirai tout ce que je pourrai souffrir pour lui, puisqu\'il l\'a tant mérité contre moi et contre tous les pécheurs ; c\'est pourquoi je vous dis avec certitude que je ne l\'abandonnerai jamais, que je souffrirai tout ce que je pourrai souffrir pour son saint nom, et que je me remets entièrement à sa sainte grâce. Puis, avec une grande colère, ils mirent ce manteau brûlant sur son corps nu et béni. Alors il se mit à genoux, invoqua Dieu avec douceur et dit: O Dieu tout-puissant, ayez pitié de moi. Et aussitôt, le harnais brûlant se détacha de son corps béni et brûla tous ceux qui voulaient le punir avec tant de colère, miracle par lequel beaucoup d\'hommes se convertirent et furent baptisés de saint Érasme. Alors lui apparut de nouveau l\'ange de Dieu et dit : O Érasme, champion de Dieu, tu iras de nouveau en Campanie, et là tu souffriras de grandes douleurs passagères, et Dieu t\'ordonne d\'y convertir beaucoup de gens, et tout ce que tu désireras de lui pour la santé de ton âme, cela te sera accordé. Alors saint Érasme s\'agenouilla docilement et dit : O Dieu tout-puissant, Père des cieux, que ta volonté soit accomplie en moi. Puis il se rendit de nouveau avec joie dans le pays de Campanie et y prêcha de nouveau la parole de Dieu, et convertit de nombreuses personnes à la foi chrétienne.

L\'empereur Maximien prit alors ce saint homme et le fit comparaître devant lui. Il lui ordonna de se laisser conduire vers les faux dieux et de les adorer. Et quand ce saint homme se présenta devant les faux dieux, ceux-ci ne purent plus se tenir debout, mais ils tombèrent et se brisèrent tous en morceaux, se réduisant en cendres ou en poussière. Lorsque l\'empereur eut connaissance de ces faits, il en fut très irrité et ordonna de couler une cuve remplie de clous de fer, d\'y mettre ce saint homme nu, de la fermer solidement et de la laisser tomber du haut d\'une colline. Alors l\'ange de Dieu vint réconforter ce saint homme, le sortit du tunnel et le guérit, et lui dit: Ô Érasme, le serviteur très choisi de Dieu, ne cesse pas, mais va et prêche encore, et ne te soucie d\'aucune douleur. Ce à quoi il obéit docilement. Alors l\'empereur le reprit, et ordonna qu\'on lui arrache les dents de la tête avec des pinces de fer. Après quoi, on l\'attacha à un pilier et on carda sa peau avec des cartes de fer, puis on le fit rôtir sur un gril, et tandis qu\'il gisait, il parlait gaiement à ses bourreaux: Je gis ici mieux que je ne le mérite, car je suis couché sur un lit bien garni de douces roses, et je vois la lumière éternelle, le Fils de Dieu, assis à la droite de son Père.

Alors, le cruel empereur prit la parole. Comme il est très gâcheur, et qu\'il se moque de nous et de nos dieux, il mérite d\'être conduit à la mort la plus cruelle que nous puissions imaginer pour lui. Ils prirent alors ce saint homme et le mirent dans une fosse profonde et pleine de puanteur. Et alors cet empereur déchu et cruel prit conseil pour décider quel martyr et quelle douleur infliger à ce saint homme pour l\'amener à la mort. Ils jugèrent qu\'ils feraient mourir ce saint homme s\'ils le martyrisaient et le faisaient souffrir pendant une année entière, et c\'est ce qu\'ils faisaient avant et après chaque dimanche, avec de nouvelles douleurs, les plus lourdes et les plus aiguës qu\'ils pouvaient imaginer pour lui. Lorsque l\'empereur eut ainsi pris son astucieux conseil, ils sortirent ce saint Érasme de cette fosse puante et lui plantèrent des clous de fer dans les doigts, puis ils lui arrachèrent les yeux de la tête avec les doigts, et ensuite ils étendirent ce saint évêque nu sur la terre et l\'allongèrent avec des cordes solides attachées à des chevaux autour de son cou béni, de ses bras et de ses jambes, de sorte que toutes les veines et tous les tendons qu\'il avait dans le corps éclatèrent. Puis ils le laissèrent étendu dans le champ pour que les bêtes le mangent.

Alors une voix vint du ciel, et dit : O Érasme lève les yeux, la couronne de la vie éternelle est prête pour toi. Et sur ce, il leva ses yeux sacrés vers le ciel, et il vit s\'ouvrir la joie éternelle, et il dit : O Dieu, où étais-tu ? Que ton nom soit béni. Alors le saint homme fut sain et sauf, et un ange lui apporta du ciel une étoffe de pourpre, et lui ordonna d\'aller de nouveau prêcher la parole de Dieu, ce qu\'il fit avec plus de vigueur qu\'auparavant.

Quand l\'empereur et son faux conseil comprirent cela, il idevint fou de rage, et appela d\'une voix forte comme s\'il avait été fou, et dit : C\'est le diable, ne ferons-nous pas mourir ce caïffond ? Alors il trouva un conseil pour faire un guindeau, et c\'était le dernier dimanche de l\'année, et on plaça ce saint martyr sous le guindeau tout nu sur une table, et on le coupa sur le ventre, et on lui arracha les entrailles ou les boyaux de son corps béni. Mais quand ce cruel empereur vit qu\'ils ne pouvaient pas faire mourir ce saint homme avec toutes ces douleurs et tous ces tourments, ils l\'enchaînèrent et lui attachèrent les mains et les pieds avec de grands fers, et le jetèrent avec une grande force dans une fosse nauséabonde, qu\'ils fermèrent avec de grands verrous de fer, afin qu\'il ne le voie plus jamais. Alors lui apparut un ange de Dieu, avec une grande clarté, et il dit :

Ô Érasme, lève-toi. Et aussitôt tombèrent de lui tous ses fers et toutes ses bandes, et il fut amené dans une ville appelée Fremyana, et là il fit passer de la mort à la vie un enfant qui était l\'enfant d\'un gentilhomme, dont le père était Anastase, miracle par lequel plusieurs milliers de personnes furent converties à la foi chrétienne ; dans cette ville ce saint homme demeura sept jours, prêchant la parole de Dieu et fortifiant le peuple dans la croyance chrétienne. Quand l\'heure fut venue pour ce saint évêque et martyr de Dieu de quitter ce monde, alors se fit entendre une voix puissante venant du ciel et disant :

\" Érasme, mon vrai serviteur, tu m\'as rendu un vrai service, C\'est pourquoi, viens avec moi et va entrer dans la béatitude et la joie de ton Seigneur, et je te promets, à toi et à tous ceux qui pensent à ta grande douleur, qui invoquent ton saint nom, qui te poursuivent et te vénèrent chaque dimanche, que je leur accorderai tout ce qu\'ils me demanderont en ton nom pour le bien de leurs âmes. Maintenant viens, mon ami véritable et choisi, sois heureux et réconforté par mon ascension. Je veux que tu te lèves avec moi et que tu viennes t\'asseoir à la droite de mon Père. Alors ce saint homme se réjouit et s\'égaya, et il jeta les yeux vers le ciel, en levant les mains, et là il vit une couronne resplendissante venir du ciel sur sa tête bénie. Alors il loua et remercia le Dieu tout-puissant en baissant la tête et en s\'agenouillant, et en levant les deux mains vers le ciel, et il dit humblement : Seigneur, entre vos mains, je remets mon esprit, et ce dimanche, recevez mon âme dans votre paix et votre repos. Et en disant ces mots, il rendit l\'esprit, ce qui fut vu par les yeux de beaucoup d\'hommes, brillant plus clairement que le soleil, et comment il fut reçu par les saints anges, et fut conduit à travers les hauteurs du ciel dans le plan le plus élevé du ciel : là, il se tient avec Dieu, avec toute la sainte compagnie, et il est là un véritable soutien pour tous ceux qui appellent vraiment à saint Érasme pour la santé fantôme, dont la joie et la santé fantôme nous prions qu\'il obtienne pour nous tous de notre Seigneur Dieu.