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Les amours de Mars et de Vénus

Poème de Reposianus (IIIe voire IVe ou Ve siècle)

traduit par E. -F. Corpet (1843)

APPRENEZ qu’il ne faut jamais croire à la sécurité dans
les amours. Vénus elle-même, qui commande à la flamme :
à l’ardente milice, qui pouvait aimer sans crainte sous la
garde de Cupidon, qui enseigne la ruse et protège les larcins des amours, Vénus ne put trouver pour elle un réduit assuré.

Dur et méchant enfant, cruel par le crime de ta
mère, tu promènes partout tes triomphes, Amour, et nulle
conquête ne peut t’assouvir. Puisque tu te ris de Jupiter,
que tu forces toujours de détourner ses foudres, prouve-lui
aujourd’hui, à ta gloire, que tes flèches ont des feux plus
puissants.

Enlace, enfant, Vénus et Mars dans les anneaux d’une même chaîne ; que Mars amoureux porte
la marque de l’esclavage ; qu’il soit chargé de liens et captif
à son tour, ce guerrier redouté ; qu’il traîne ton char,
et que, dompté par l’amour, il fléchisse son cou farouche
sous ton joug de roses. Après le carnage, après la guerre,
le puissant Mars soupire,

soldat novice, en ton camp ;
lui devant qui tout tremble, il tremble devant toi, et
suit la chaîne qui le mène au plaisir. Allez, Muses que
j’implore ; pendant que Mars, pendant que la caressante
Cythérée, exhalent de leur sein de nombreux soupirs,
pendant que leurs lèvres enlacées confondent leur haleine,

préparez dans des vers harmonieux ces chaînes de Vulcain,
qui doivent emprisonner Mars, sans blesser au milieu des
plaisirs les bras de Vénus que meurtrirait presqu’un lien
de roses. Car on dit que la déesse de Paphos, aimée de
Vulcain et de Mars, fut surprise en adultère et trahie par
Phébus, et que son époux, usant de ses justes droits, la
chargea de chaînes.

Elle porta aux mains de dures étreintes,
elle subit les liens de fer de son époux. Quelle vive douleur pour elle ! Est-ce l’Amour qui lui donna du courage ?
Cruel Vulcain, pourquoi ce travail ? Pourquoi forger dans
les feux des Cyclopes des fers à Vénus ? Il faut a ses mains
des chaînes de roses : et ne les attache pas toi-même ; laisse
Cupidon l’enlacer avec adresse ; il ne lui déchirera pas le
bras des durs nœuds de tes étreintes.

Il y avait un bois cher à Mars, où se plaisait la déesse
depuis la perte d’Adonis : sûr asile pour l’adultère, si
Phébus ne l’eût pas éclairé, il était digne de l’amour de
Cypris, digne des hommages de Byblos et de la protection
des Grâces. Dans ce bois ne s’élèvent pas de vils herbages,
mais des fleurs dont la pourpre se nuance à la blancheur
des lis. La terre prodigue au bois sa parure ; ici la vigne
étend son ombrage, plus loin le laurier, puis le myrte : et
les lauriers ont là des beautés nouvelles ; car, parmi leur
feuillage, le lis penche sa tige odorante : là aussi la rose et
la violette, et tout l’éclat des fleurs ; là, parmi les violettes,
le tendre hyacinthe à la riante chevelure.

Aimable séjour,
riche de tant de dons ! Et pourtant ni l’or ni la pourpre ne
brille en ces bocages : partout des lits de fleurs, retenus
par des guirlandes de fleurs, et jonchés d’une litière de
fleurs. L’opulente nature est en travail pour les plaisirs de
Vénus. La, de limpides fontaines se couvrent de roseaux,
non de roseaux vulgaires, mais de ceux dont l’enfant Cupidon façonne ses flèches cruelles. C’était, je crois, le seul
bois réservé par la déesse de Paphos à ses amours : c’est là
que d’ordinaire elle attend Mars.

Où sont les Grâces ? où
sont les Charites ? Pourquoi, cruel enfant,ne point enlacer les bandelettes ? Toi, fais-lui un lit de roses : toi, prépare les guirlandes, et rattache gracieusement sa chevelure avec des nœuds de roses. Toi, cueille la fleur purpurine,
respire-la longtemps pour en savourer le parfum, et que ta
douce main… la plonge dans ton sein ; mais, de peur que
la rose empourprée ne te blesse de son épine, effeuille-la
avant de la presser sur la tendre gorge. Tels sont les divertissements qui conviennent aux Nymphes dans le bois de
Vénus. Protégez contre toute atteinte les amours de la
déesse ; entrelacez prudemment de liens serrés les rameaux
épais, pour que Titan ne puisse percer le feuillage de l’éclat
de ses rayons.

Ainsi dans ces bocages, pendant que Mars livre d’horribles
batailles, et frappe cruellement les peuples d’épouvante,
Vénus se divertit, mêlée aux tendres filles de Byblos. Tantôt elle rappelle en ses chants les divers amours des dieux ;
tantôt, en s’accompagnant de la voix, elle balance son beau
corps avec grâce, elle entremêle vivement ses pas, elle pose
en soulève son pied tour à tour ; puis, mollement soutenue
sur son jarret qui plie, elle s’assied. Souvent aussi elle attache de belles fleurs dans les tresses de sa chevelure, ou pare d’un peigne divin ses cheveux parfumés d’ambroisie.
Pendant que la douce Vénus cherche ainsi, en variant ses
jeux et ses plaisirs, à Soulager son amour qui languit dans
l’attente, pendant qu’elle pleure, parce que les voluptés
qu’elle aime tardent à venir, voici le dieu de retour après
la guerre ; après les combats, voici le farouche vainqueur
vaincu par l’amour.

Pourquoi porter ces armes de fer ? Pour
ne point effrayer Cypris, il faut te couronner de roses.
Ah ! que de fois la déesse, affectant un courroux menteur,
accusa du regard son tardif amant ! Souvent aussi en pleurant elle le menaça d’un faible coup de son bouquet ; en
pour mieux séduire encore le guerrier qu’elle embrase,
elle s’approche, suspendant un baiser à ses tendres lèvres ;
elle ne se livre pas tout entière, elle ménage ses caresses et
mesure son amour.

Mars subjugué dépose ou de ses mains
laisse glisser sa lance : elle tombe ; un myrte la retient suspendue à ses branches. Emporte ce glaive, enfant ; toi,
Grâce, dégrafe ce casque : que l’une d’entre vous détache
ces nœuds, qu’une autre brise ces courroies de fer ! Débarrassez, filles de Byblos, la poitrine endurcie de Mars du poids
de la cuirasse, prenez son bouclier et ses javelots ; il ne
doit aujourd’hui toucher que des violettes.

Réjouis-toi,
Cupidon, ta seule puissance a dompté le dieu terrible.
Pour javelots il veut des fleurs, pour boucliers des guirlandes de myrte, et une rose au lien du glaive qui pourrait te nuire et qu’avec raison tu redoutes. Mars s’était dirigé vers le lit, et pesant durement de toute sa lourdeur
sur les roses, il en flétrit toute la fraîcheur. La belle Vénus
marchait avec précaution, marquant à peine la trace de
ses pas, craignant de blesser ses tendres pieds aux aiguillons des fleurs : tantôt elle renoue sa chevelure qui se détacherait sous les baisers ; tantôt, laissant flotter sa robe,
elle en relève les plis à peine : elle ne veut ni se cacher tout
entière, ni mettre à un tout son amour. Lui, du milieu
des fleurs qui le couvrent pour voiler ses larcins, contemple Vénus d’un œil avide, et tout entier s’enflamme et
frissonne.

La déesse s’étend sur la couche. Saint Cupidon !
quelles douces paroles, quels tendres mois ils murmurent !
Que de baisers s’échangent et s’attachent à leurs lèvres ! Que
leurs membres s’enlacent bien dans ces chaudes étreintes !
Mars presse de sa main droite la poitrine de Vénus, lui
passe autour du cou son bras gauche, et de peur que son
poids ne la blesse, ramasse au-dessous d’elle les lis blancs
et les feuilles de roses. Souvent, d’un léger mouvement de
sa cuisse, la déesse a réveillé dans son amant les flammes
qu’elle seule allume. Enfin la fatigue abat les membres
de Mars, qui s’abandonne aux langueurs du repos ; mais
tout l’amour, toute la flamme du dieu ne l’ont point quitté :
du fond de sa poitrine, des soupirs s’échappent pendant
son sommeil, et ses poumons haletants soufflent Vénus et
tous ses feux.

Vénus elle-même est embrasée de poisons
brûlants dont l’ardeur la dévore, et son sommeil n’est pas
moins agité. Quel doux repos pourtant ! Qu’elle est belle
ainsi, avec ses membres nus abattus par le sommeil ! Soutenu
sur ses bras de neige, son cou brille d’un pur éclat, et sur
sa poitrine qui se gonfle deux boutons étincellent. À demi
renversé, son corps s’incline mollement sur le côté ; et les
cuisses repliées, l’œil tourné vers Mars, elle s’est endormie
gracieuse et décente. À l’entrée du bois, Cupidon, maître
des armes de Mars, après les avoir examinées l’une après
l’autre, attache d’un lien de fleurs la cuirasse. le bouclier,
le glaive, le casque et son aigrette menaçante : puis il lève
la lance, il la pèse, et s’étonne que ses flèches aient eu tant
de puissance.

Déjà Phébus avait envahi de ses rayons la moitié de l’univers ; déjà, dans les es paces élevés qu’il embrase, il partageait également les heures du jour, et retenait ses coursiers
enflammés. Lumière jalouse, hélas ! qui découvre les amants !
Pourquoi, Phébus, trahir par tes clartés les amours de Vénus ?

Interdits devant un tel juge, Mars, Amour et Vénus
tremblent à la vue de tes rayons qui se glissent à travers les
branches ; ils ne peuvent nier leur crime dont tu es témoin.
Phébus, qui laissait aller ses rênes, aperçoit Mars aspirant
sur le sein de Vénus tous les feux de l’amour. Ô trompeuse
sécurité des choses ! les dieux eux-mêmes ne peuvent goûter des plaisirs tranquilles. Qui ne compterait, quand Cypris aime, et avec un tel garant, sur un amour sans trouble ?

Si nous avons l’exemple d’une divinité prise en défaut, que
peut espérer le mortel pour ses amours ! Où porter nos
vœux, quels dieux implorer, pour être en sûreté dans
l’adultère ? Cypris aime, et n’aime point sans danger !
Phébus retient ses rênes, et tournant, je crois, tous ses
rayons vers le bois, il prononce ce peu de mots : « Lance
à présent tes traits, Cupidon ! à présent, divine Vénus,
que te voilà vaincue par les flèches de ton fils, tu me consoles : sous ton joug j’ai aimé sans crainte ; nos amours sont
la fable du monde, mais ne sont point un crime. .»
Il dit,
et irrite Vulcain de ces amères paroles :
« Dis-moi où peut
être la pudique Cythérée, mari sans défiance ; elle t’appelle
en pleurant, elle te réserve son chaste amour. Cherche-moi
aussi Mars, à qui tu as naguère forgé des armes ; ou si par
hasard tu ignores les vices effrontés de ta Vénus… .»
Il dit,
et illumine le bois des flots de sa lumière ; il verse tous ses
feux pour dévoiler le crime.

Le dieu du feu demeure stupéfait à la vue d’un tel outrage : presque immobile de torpeur,
il maîtrise à peine sa douleur et sa colère ; ses lèvres frémissent, il pousse du fond de sa poitrine des sanglots lamentables ; il exhale en courroux des soupirs étouffé. Il court
dans sa fureur aux autres de l’Etna. À ses ordres, tous les
bras s’empressent ; la douleur seconde les efforts de l’art.
Quels prompts serviteurs que l’art, la divinité, la flamme,
l’hymen, la rage et la douleur ! À peine, en donnant ses ordres, il en avait expliqué le motif, que déjà l’ époux emportait
des chaînes pour sa vengeance.

Il s’approche du bois sans
être vu de l’Amour ni des Grâces : toutes ses colères sont
protégées par la ruse. Alors, à coups légers et suspendus,
il rive des fers aux mains des coupables ; il enlace les bras
robustes aux tendres bras. Mars et la belle Cythérée s’éveillent.
Mars pourrait briser ces solides entraves, mais son
amour le retient, il blesserait les bras de Vénus.

Et toi,
alors, tu te cachais sous le casque et parmi les armes ; tu
tremblais, Cupidon cruel ! Debout, l’œil menaçant, Mars s’indigne d’être surpris en adultère. Mais la déesse de
Paphos ne s’abaisse point à déplorer la découverte de sa
faute ; elle songe à la vengeance : après avoir roulé plusieurs projets en son esprit, elle comprend que, pour punir Phébus, il faut qu’il aime ; et, sans attendre, elle prépare déjà ses pièges, elle embellit les cornes du taureau
qui doit rendre Pasiphaé coupable, et venger Cupidon son
complice.

De concubitu Martis et Veneris

Discite securos non umquam credere amores:

ipsa Venus, cui flamma potens, cui militat ardor,

quae tuto posset custode Cupidine amare,

quae docet et fraudes et amorum furta tuetur,

nec sibi securas valuit praebere latebras

Improbe, dure puer, crudelis crimine matris,

pompam ducis, Amor, nullo satiate triumpho !

Quid conversa Iovis laetaris fulmina semper ?

Ut mage flammantes possis laudare sagittas,

iunge, puer, teretes Veneris Martisque catenas:

gestet amans Mavors titulos et vincula portet

captivus, quem bella timent; utque ipse veharis,

iam roseis fera colla iugis submittat amator.

Post vulnus, post bella potens Gradivus anhelat

in castris modo tiro tuis, semperque timendus

te timet et sequitur qua ducunt vincla marita.

Ite, precor, Musae: dum Mars, dum blanda Cythere

imis ducta trahunt suspiria crebra medullis,

dumque intermixti captatur spiritus oris,

carmine doctiloquo Vulcani vincla parate,

quae Martem nectant Veneris nec brachia laedant

inter delicias roseo prope livida serto.

Namque ferunt Paphien, Vulcani et Martis amorem,

inter adulterium nec iusti iura mariti

indice sub Phoebo captam gessisse catenas:

illa manus duros nexus tulit, illa mariti

ferrea vincla sui. Quae vis fuit ista doloris !

An fortem faciebat amor ? Quid, saeve, laboras ?

Cur nodos Veneris Cyclopia flamma paravit ?

De roseis conecte manus, Vulcane, catenis !

Nec tu deinde liges, sed blandus vincla Cupido,

ne palmas duro cum nodus vulnere laedat.

Lucus erat Marti gratus, post vulnera Adonis

pictus amore deae; si Phoebi lumina desint

tutus adulterio: dignus quem Cypris amaret,

quem Byblos coleret, dignus quem Gratia servet.

Vilia non illo surgebant gramina luco:

pingunt purpureos candentia lilia flores;

ornat terra nemus: nunc lotos mitis inumbrat,

nunc laurus, nunc myrtus. Habent sua munera rami:

namque hic per frondes redolentia lilia pendent,

hic rosa cum violis, hic omnis gratia florum,

hic inter violas coma mollis laeta hyacinthi:

dignus amore locus, cui tot sint munera rerum !

Non tamen in lucis aurum, non purpura fulget:

flos lectus, flos vincla toris, substramina flores:

deliciis Veneris dives natura laborat:

texerat hic liquidos fontes non vilis harundo,

sed qua saeva puer componat tela Cupido:

hunc solum Paphie, puto, lucum fecit amori.

Hic Martem expectare solet: quid Gratia cessat,

quid Charites ? Cur, saeve puer, non lilia nectis ?

Tu lectum consterne rosis, tu serta parato

et roseis crinem nodis subnecte decenter.

Haec modo purpureum dccerpens pollice florem

cum delibat eum, suspiria ducat odore;

ast tibi blanda manus (florem) sub pectore condat;

tu, ne purpurei laedat te spina roseti,

destrictis teneras foliis constringe papillas:

sic decet in Veneris lucis gaudere puellas !

Ut tamen inlaesos Paphiac servetis amores,

vincula sic mixtis caute constringite ramis,

ne diffusa ferat per frondes lumina Titan.

His igitur lucis Paphie, dum proelia Mavors

horrida, dum populos diro terrore fatigat,

ludebat teneris Bybli permixta puellis:

nunc varios canto divom referebat amores

inque modum vocis nunc motus forte decentes

corpore laeta dabat, nunc miscens denique plantas,

nunc alterna movens suspenso pollice crura,

molliter inflexo subnitens poplite sidit;

saepe comam pulchro collectam flore ligabat,

ornans ambrosios divino pectine crines.

Dum ludos sic blanda Venus, dum gaudia miscet

et dum suspenso solatia quaerit amori,

dum flet quod sera venit sibi grata voluptas,

ecce furens post bella deus, post proelia victor

victus amore venit. Cur gestas ferrea tela ?

Ne metuat Cypris, comptum decet ire rosetis.

A, quotiens Paphie vultum mentita furentis

lumine converso serum incusavit amantem !

Verbera saepe dolens mentita est dulcia serto,

aut, ut forte magis succenso Marte placeret,

amovit teneris suspendens oscula labris,

nec totum effundens medio blanditur amore.

Decidit aut posita est devictis lancea palmis;

sed, dum forte cadit, myrto retinente pependit.

Ensem tolle, puer; galeam tu, Gratia, solve !

Haec laxet nodos, haec ferrea vincula temptet:

solvite, Bybliades, praeduri pectora Martis

loricaeque moras; vos scuta et tela tenete:

nunc violas tractare decet ! Laetare, Cupido,

terribilem divum tuo solo numine victum:

pro telis flores, pro scuto myrtea serta,

et rosa forte loco est gladii, quem iure tremescunt !

Iverat ad lectum Mavors, et pondere duro

floribus incumbens totum turbarat honorem;

ibat pulchra Venus vix presso pollice cauta,

florea ne teneras violarent spicula plantas;

et nunc innectens, ne rumpant oscula, crinem,

nunc vestes fluitare sinens, vix, laxa retentat,

cum nec tota latet nec totum nudat amorem.

Ille inter flores, furtivo lumine, tectus,

spectat hians Venerem totoque ardore tremescit.

Incubuit lectis Paphie. Proh sancte Cupido,

quam blandas voces, quae tunc ibi murmura fundunt !

Oscula permixtis quae tunc fixere labellis !

Quam bene consertis haeserunt artibus artus !

Stringebat Paphiae Mavors tunc pectore dextram

et collo innexam ne laedant pondera laevam,

lilia cum roseis supponit candida sertis;

saepe levi cruris tactu commovit amantem

in flammas, quas diva fovet. Iam languida fessos

forte quies Martis tandem compresserat artus;

non tamen omnis amor, non omnis pectore cessit

flamma dei: trahit in medio suspiria somno

et venerem totis pulmonibus ardor anhelat.

Ipsa Venus tunc tunc calidis suspensa venenis

uritur ardescens, nec somnia parta quiete...

O quam blanda quies ! O quam bene presserat artus

nudos forte sopor ! Niveis suffulta lacertis

colla nitent; pectus gemino quasi sidere turget.

Non omnis resupina iacet, sed corpore flexo

molliter et laterum qua se confinia iungant;

Martem respiciens, deponit lumina somno,

sed gratiosa, decens... Pro lucis forte Cupido

Martis tela regens; quae postquam singula

loricam clipeum gladium galeaeque minaces

cristas flore ligat: tunc hastae pondera temptat

miraturque suis tantum licuisse sagittis.

Iam medium Phoebus radiis possederat orbem,

iam tumidum calidis spatium libraverat horis:

flammantes retinebat equos. Proh conscia facti

invida lux ! Veneris qui nunc produntur amores

lumine, Phoebe, tuo ! Stant capti indice tanto

Mars Amor et Paphie, ramisque inserta tremescunt

lumina, nec crimen possunt te teste negare.

Viderat effusis Gradivum Phoebus habenis

in gremio Paphiae spirantem incendia amoris.

O rerum male tuta fides ! O gaudia et ipsis

vix secura deis ! Quis non, cum Cypris amaret,

praeside sub tanto tutum speraret amare ?

Criminis exemplum si iam de numine habemus,

quid speret mortalis amor ? Quae vota ferenda ?

Quod numen poscat, quo sit securus adulter ?

Cypris amat, nec tuta tamen ! Compressit habenas

Phoebus et ad lucos tantum puto lumina vertit,

et sic pauca refert: «  Nunc sparge tela, Cupido;

nunc nunc, diva Venus, nati devicta sagittis,

da mihi solamen: sub te securus amavi:

fabula, non crimen, nostri dicentur amores».

Haec ait et dictis Vulcanum instigat amaris:

«  Dic ubi sit Cytherea decens, secure marite !

Te expectat lacrimans, tibi castum servat amorem ?

Vel, si forte tuae Veneris fera crimina nescis,

quaere simul Martem, cui tu modo tela parasti».

Dixit et infuso radiabat lumine lucum,

inque fidem sceleris totos demiserat ignes.

Haeserat Ignipotens, stupefactus crimine tanto;

iam quasi torpescens –  vix sufficit ira dolori  –

ore fremit maestoque modo gemit ultima pulsans

ilia et indignans suspiria pressa fatigat.

Antra furens Aetnaea petit: vix iusserat, omnes

incubuere manus: multum dolor addidit arti.

Quam cito cuncta gerunt ars numen flamma maritus

ira dolor ! Nam vix causam tunc forte iubendo

dixerat, et vindex coniunx iam vincla ferebat.

Pervenit ad lucos, non ipsi visus Amori,

non Chariti : totas arti mandaverat iras.

Vincula tunc manibus suspenso molliter ictu

inligat et teneris conectit bracchia palmis.

Excutitur somno Mavors et pulchra Cythere:

posset Gradivus validos disrumpere nexus,

sed retinebat amor, Veneris ne bracchia laedat.

Tunc tu sub galea, tunc inter tela latebas,

saeve Cupido, timens. Stat Mavors lumine torvo

atque indignatur, quod sit deprensus adulter;

at Paphie conversa dolet non crimina facti,

sed quae sit vindicta sibi tum singula volvens

cogitat et poenam sentit, si Phoebus amaret.

Iamque dolos properans decorabat cornua tauri,

Pasiphaae crimen mixtique cupidinis iram.