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Cède à l’Amour


extrait de Bucolique de Virgile, -37 av J.-C, épilogue X, vers 69,
Trad. de la collection M. Nisard, Paris, 1850

[55] « Cependant j’irai, me mêlant aux nymphes, fouler les sommets du Ménale, et je poursuivrai les sangliers impétueux : les frimas les plus rigoureux ne m’empêcheront pas de cerner avec ma meute les forêts du mont Parthénius : il me semble déjà courir à travers les rochers et les bois retentissants : nouveau Parthe, j’aime à décocher [60] la flèche cydonienne : comme si c’étaient là des remèdes à mon incurable amour ; comme si le cruel Amour savait s’attendrir aux maux des mortels ! Déjà les Hamadryades, déjà les chants ne me plaisent plus ; et vous aussi, forêts, adieu : mes rudes travaux ne pourraient vaincre l’invincible Amour ; [65] non, quand même je boirais les eaux glacées de l’Hèbre, quand au fort des hivers pluvieux j’endurerais les neiges de la Sithonie ; quand même, à l’heure où l’écorce desséchée des grands ormeaux meurt sous les feux du midi, je conduirais mes brebis dans les plaines de l’Éthiopie, brûlées par le Cancer : l’Amour soumet tout ; et toi aussi, cède à l’Amour. »